Cali, donc, est notre première vraie ville en Colombie. Nous avons atterri dans le quartier de San Antonio, qui par certains aspects évoque Santa Teresa à Rio, mais en moins pentu et sans vue sur la mer. Oui je sais, ce genre de remarque ça fait un peu “j’me la pète” , comme diraient nos enfants.
Mais, enfin, c’est juste ce qui nous est venu à l’esprit en déambulant dans le quartier.
Bref, bâtisses coloniales peintes aux couleurs vives, fresques murales “stritarte”, bordent des rues pentues, car le quartier est juché sur une colline d’où on aperçoit le reste de la ville, selon les rues. C’est plutôt chouette et l’ambiance paisible contraste avec l’urbanisation du centre-ville, pourtant tout proche, où la circulation des motos, voitures, bus et camions s’accapare toute l’attention.
On se disait aussi qu’avec le retour dans une grande ville, on retrouvait la misère plus visible. Par des contrastes plus forts et sans doutes aussi, comme dans toutes les grandes villes, par l’anonymat qui va de pair. Ceux qui dorment sur un coin de trottoire ne sont pas rares et les mendiants non-plus.
Tout à l’heure, nous étions assis en terrasse d’un petit magasin d’alimentation, à siroter une bière (oui ça aussi je sais…), quand nous avons fait la connaissance d’Oscar. 50 ans, charpentier, au chômage avec sa vieille maman en charge. Il vient d’un village frontalier avec le Venezuela (qui comme chacun sait est en crise politique, économique et donc sociale) où, dit-il, pour se faire de l’argent, il suffit de passer la frontière pour aller chercher de l’essence à un prix défiant toute concurrence pour la revendre côté colombien (où le prix à la station tourne autour de 0,70 €/litre). Lui n’a pas un sous et veut acheter du pain et du lait… Je lui ai donné quelques pièces.
Ce qui n’est pas juste. Car un peu plus tôt, puis un peu plus tard aussi, dans la même journée, j’ai envoyé balader deux autres mendiants. Alors pourquoi ?
Je ne sais pas. Un coup oui, un coup non, juste selon l’humeur…? Y’a pas pire comme injustice, non ?
En Afrique, dans une autre vie, je déjeunais du café et du pain sur un marché, lorsque deux enfants se sont approchés de moi. Ils sont restés en retrait sans rien dire. J’ai mangé la moitié de mon pain et bu la moitié de mon café, puis je me suis levé et j’ai poussé mon demi petit déjeuner vers eux. L’un d’eux m’a pris la main et m’a regardé dans les yeux sans rien dire. Voilà, ça fait 25 ans, je n’ai jamais oublié et parfois je me demande ce qu’ils sont devenus.
Mon bon Aldo, la misère du monde est bien trop grande pour un seul homme. Alors une pièce pour celui là, c’est juste bien pour lui à ce moment. Continuez sereinement votre périple, peut être que 2 africains se demandent si tu roule toujours en moto
Hasta la vista camarade.