D’accord, on pourrait s’attendre à une approche de la question à l’aide de données statistiques, de pyramides des âges ou quelques chose de ce genre. Mais d’abord je n’ai jamais eu d’affinités particulières avec les chiffres, il y aurait comme qui dirait fâcherie entre les chiffres et moi, bien que je n’ai jamais cherché à élucider qui de nous deux (les chiffres ou moi) à commencé…

Ensuite, ma vision des choses n’a aucune prétention de vérité. Bref, il vaut mieux en rester à du pur subjectif. Or, cette jeunesse, puisque c’est bien d’elle dont s’agit, nous a particulièrement touché. Je vous épargnerai la complainte du type : “bien sur, la notre (de jeunesse) s’éloigne à grands pas” ou encore : “ce sont sans doutes nos enfants que nous voyons en eux”, etc. Nous avons croisés de nombreux jeunes en longue vadrouille à travers le continent. Argentins pour la plupart, ce qui d’après l’un deux est sans doutes dû au fait que les argentins sont un peuple issu de racines internationales. Ce qui serait une motivation pour la bougeotte… Pourquoi pas ?

Ces jeunes argentins (mais aussi chiliens) se déplacent en solo à vélo, en couple ou en groupe dans un fourgon qui évoque les hippies de la beat génération. Certains arborent une carte du continent peinte sur la carosserie, d’autres quelques mots : “offrez nous 1 litre d’essence pour aller plus loin”, “un voyage de musique et spectacles”, etc. Ils arrivent dans les endroits fréquentés avec des instruments de musique, du matériel pour jongler ou encore avec de l’artisanat (bracelets, et divers bijoux) dont la vente permet de gagner trois sous pour aller plus loin, plus longtemp. Chevelus, en short et pieds nus, ils sont souriants et plein de vie, n’inspirent jamais la pitié et d’ailleurs les sédentaires à qui s’adressent les spectacles les perçoivent avec respect et bienveillance. En terrasse de resto ou de bars, les spectateurs donnent souvent une pièce ou un petit billet, quelques fois offrent un verre le temps d’échanger quelques mots.

Il existe un système de volontariat très répandu à travers le continent auquel ces jeunes qui “font la route” ont souvent recours. Dans des fermes, des auberges ou autres, en échange de quelques heures de travail par jour, ils bénéficient d’un hébergement gratuit et quelquefois d’un repas. Certains voyagent ainsi depuis plusieurs années et, lorsque nous posons la question du secret d’une telle décontraction à l’un d’eux, sa réponse est simple : “en Amérique du Sud, personne ne meurt de faim, il y a de la nourriture partout pour vraiment pas cher, et il est facile de travailler n’importe où”. Ce à quoi il ajoute ensuite : “nous avons quitté notre confort pour choisir ce mode vie depuis plus d’un an, et n’avons aucun regret”.

Nous ne pouvons pas nous empêcher de penser à “nos jeunes”, à la pression de la “réussite” et à l’inquiétude vis à vis de leur avenir.

A Bogota, nous avons sympathisé avec d’autres jeunes dont l’histoire diffère sensiblement. De 18 à 25 ans, ils sont vénézuéliens et fuient une situation économique qu’ils jugent sans lendemain. Garçons ou filles, ils nous racontent qu’une boite d’oeufs coute les ¾ d’un salaire de base, le système ne fonctionne plus et les gens ordinaires en sont réduits à la débrouillardise. Étudiants, ils n’étaient pas les plus mal lotis et faisaient partie des chanceux qui possédaient un passeport. Ils ont donc tout quitté, études, famille, amis pour tenter leur chance ailleurs et redonner une valeur au mot Espoir. Dégoûtés de leurs politiciens voleurs uniquement préoccupés par leur enrichissement personnel, ils n’attendent plus rien de ces gens là. Lorsque je leur parle d’élections, ils me répondent en rigolant : “quelles élections ? Chavez était élu pour 5 ans, il est resté 10 ans. Son successeur en est à 4 ans, et il n’est nullement question d’élections”. Le plus étonnant est qu’avec ce constat des plus sombre, ils aiment leur pays. Ils s’empressent d’ajouter : “Les gens ordinaires sont bons, nous avons un beau pays mais nous sommes gouvernés par des brigands”.

Et bien croyez-le ou pas, ces jeunes là non-plus n’inspiraient aucune pitié. Non, plutôt un grand respect qui dénotait avec leur jeune âge. Ils auraient pu être nos enfants, contraints de grandir très vite. Pleins d’entrain, ils ne plaignaient pas. Ils n’ont aucune idée de ce que sera leur vie, quel sera le point d’arrivée de leur transhumance, mais eux aussi étaient souriants. La vie reste la plus forte, quoi qu’il en soit. Nous les avons aimé pour ça aussi. Après quelques jours passés ensembles, nous sommes repartis et n’aurons plus de leurs nouvelles. Avec un mélange d’inquiétude et d’espoir, nous ne pouvons que souhaiter que leur vie leur réserve de belles choses…

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