Le grand bol d’air

 

Lorsque l’instantanéité de la communication et la mobilité à grande vitesse sont de l’ordre de l’évidence, il est parfois bon d’aller à contresens en oubliant précision et voies rapides. Par les chemins de traverse, plongeons nous dans de verdoyantes terres d’élevages, des géographies  tourmentées ou encore des forêts touffues, parsemées de bâtisses médiévales ou d’imposants manoirs. Le temps d’une pause nécessaire.

En général, ce qu’aiment les motard(e)s c’est faire de la moto ! Bien sûr, la remarque frise l’évidence. Pourtant du scooter à trois roues à la machine d’hyper-sport, la palette est suffisamment large pour admettre que les attentes puissent l’être tout autant. Face à l’ennui d’un trajet urbain pour se rendre au boulot, ou à la recherche de la trajectoire parfaite qui améliorera le chrono de votre grand gauche préféré, il y a l’émerveillement de la découverte. Or, quelle que soit votre moto, elle est capable de vous offrir le plaisir de la balade et des découvertes qui vont avec. Se plonger dans de nouveaux décors la truffe à l’air et les sens en alerte, c’est ouvrir la porte à de nouvelles odeurs, de nouvelles combinaisons de couleurs, des nouveaux goûts, … bref à de nouvelles sensations.

À deux heures de Paris, le département de l’Orne nous ouvre ces portes, en toute simplicité. Rien de spectaculaire ou de prétentieux à se mettre sous la dent, mais pas de paillettes ou d’effets de manches non-plus. De la même façon que certaines personnes discrètes cachent parfois un cœur d’or, ce petit coin de Basse-Normandie recèle quelques trésors naturels ou architecturaux, mais aussi quelques étapes où on se verrait bien rester un peu plus longtemps… Alors si vous êtes prêts à prendre le temps d’une rencontre sincère, laissez-vous guider par ces itinéraires et savourez !

 

D’Argentan à Mortagne-au-Perche

 

Argentan, troisième ville du département, est connue pour être « l’autre ville de la dentelle ». Pourtant en quittant l’agglomération, c’est une caractéristique naturelle qui apparait : la douceur des paysages vallonnés. Une nature qui en a fait une terre propice à l’élevage et à l’édification de haras. En effet, à quelques encablures à peine de la ville, derrière la forêt de Grande Gouffern, se trouve l’emblématique Haras du Pin. Ce grand domaine, « Versailles du cheval » selon les souhaits de Louis XIV, a traversé l’histoire en conservant l’objectif de favoriser l’élevage et le développement des chevaux. Aujourd’hui, il appartient à la petite famille des haras nationaux, il s’agit donc désormais d’un établissement public. Des visites et spectacles y sont régulièrement organisés.

En poursuivant notre route vers le nord, nous mettons le cap vers le Pays d’Auge, ses fermes à colombages, ses pommes et… son camembert ! Chemin faisant apparaitra un relief escarpé, le mont Ormel. Si aujourd’hui le sommet de ce relief offre un beau panorama sur toute la région, au cour de l’histoire ce mont s’est retrouvé être le siège décisif de la bataille de Normandie, en Août 1944. Un mémorial y est érigé.

Une dizaine de km plus loin, nous arrivons dans un autre lieu chargé d’histoire, mais beaucoup plus paisible ! Le village de Camembert est, en effet, le lieu où est né (juste après la Révolution) ce fromage mondialement connu, symbole à lui seul de la France et de sa gastronomie. Un musée lui est consacré, dans une vieille bâtisse caractéristique du pays d’Auge. Pour tout savoir sur ce fromage rond, c’est donc ici que ça se passe.

En remettant le cap au sud, nous arrivons rapidement dans le domaine du Parc Naturel Régional du Perche. Ce sont d’abord des paysages de bocages et de forêts qui alternent, entrecoupés de villages, de fermes et de manoirs. Emblématique du patrimoine bâti percheron, le manoir logeait le seigneur d’une exploitation agricole. Très nombreux dans la région, on en dénombre une centaine encore debout aujourd’hui. Certains se visitent, même si la plupart sont privés. En parcourant ce territoire vous en verrez nécessairement, quelques fois cachés derrière de grands arbres. Quoi qu’il en soit, le manoir de Courboyer (XV ème siècle), près de Nocé, peut se visiter aisément puisqu’il s’agit de la maison du Parc du Perche.

Bellême et son cœur de cité historique seront l’occasion d’une dernière pause avant de finir cet itinéraire à Mortagne-au-Perche. Calée sur un promontoire, la ville présente également une cité médiévale remarquable, sillonnée de ruelles pavées régulièrement bordées d’hôtels particuliers, que l’on savourera plus facilement à pied.

 

De Mortagne-au-Perche à Bagnoles-de-l’Orne

Mortagne est notre point de départ. Posée sur le relief d’une colline, il s’agit d’une ville agréable où la richesse du patrimoine bâti est bien intégrée à la ville moderne. C’est en empruntant des rues pentues que nous nous éloignons du centre historique. Puis, dès la sortie de l’agglomération, c’est une route étroite sur un décor ondulé, qui nous entraine vers une petite vallée ou alternent cultures et forêts. De grandes fermes d’élevage prennent le relai, avec d’authentiques vaches normandes dans les pâtures, lorsque nous prenons la direction de Sées.

Réputée pour son patrimoine religieux et sa qualité de cité épiscopale, la petite ville accueille en effet une imposante cathédrale de style gothique dont les premières pierres datent du XIII ème siècle. Située à seulement une vingtaine de km d’Alençon, cette séparation est majoritairement occupée  par la forêt d’Écouves. C’est là que nous allons.

Les belles courbes de la route qui y conduisent tranchent avec le quadrillage rectiligne des voies forestières qui découpent ce massif escarpé. Le soleil y crée un jeu d’ombres et lumières en se frayant un chemin jusqu’aux fougères aux pieds des grands pins. Dès la sortie de la forêt, la préfecture départementale est pourtant à portée de roues. Or, si Alençon doit sa notoriété à la dentelle éponyme (manufacture royale au XVII ème siècle), son centre historique semble revendiquer ce prestigieux passé. Ainsi, de l’ancienne Halle au blé à la basilique Notre Dame, un réseau de ruelles permet de profiter de l’architecture du centre ancien et de ses belles bâtisses.

Tout juste sortis d’Alençon, nous nous dirigeons vers les Alpes Mancelles. Cette zone naturelle particulièrement escarpée et boisée constitue une extrémité du massif Armoricain, située à cheval sur les  départements de l’Orne et de la Sarthe. Malgré une faible altitude (217 m), falaises, pierriers, vallées abruptes et rivières encaissées constituent ses paysages. Au cœur de cette géographie tourmentée, Saint-Cénéri-le-Gérei est répertorié parmi les plus beaux villages de France. D’ailleurs, touristes et randonneurs viennent parfois de loin pour admirer le petit pont de pierre qui enjambe la Sarthe.

Après une dernière pause au château de Carrouges, surprenant par le rose de ses briques, nous roulons désormais vers Bagnoles-de-l’Orne. Une ville qui pourrait évoquer Cabourg ou Deauville, par son côté vieille France et son ambiance à la fois bourgeoise et surannée. S’il s’agit d’abord d’une ville thermale, depuis le début du XX ème siècle son quartier Belle Époque apporte une identité forte à la commune, relayée dans l’entre-deux guerres par un style Art-déco. Aussi près du lac, au cœur de la ville, il suffit de tourner la tête pour balayer du regard ces différentes facettes : thermes, casinos et hôtels luxueux. Destination touristique historique, Bagnoles-de-l’Orne reste une halte agréable où le motard n’aura aucune difficulté à trouver un bon bain relaxant en fin de journée !

De Bagnoles-de-l’Orne à Argentan

Pour partir à la découverte d’une facette plus sauvage du département, nous quittons le charme désuet des thermes de Bagnoles-de-l’Orne pour mettre le cap sur les campagnes environnantes. En plein Parc Naturel Régional Normandie-Maine, derrière une zone boisée de la forêt des Andaines, émerge une terre vallonnée de bocages où quelques fermes ont élu domicile. Champsecret est un de ces villages où des éleveurs de vaches normandes et producteurs de lait ont décidé de fabriquer un camembert, « à l’ancienne ». La particularité de leur démarche tient au fait qu’elle respecte trois chartes qui en font le seul camembert bio, fermier et AOP à la fois. La ferme se visite. À quelques km de là, en passant par Domfront, prenez le temps de découvrir la cité médiévale et les ruines du  château et son donjon, avant de remettre le cap vers le nord du département.

Nous partons en effet en direction de la Suisse Normande. Un espace qui reste une anomalie dans ce territoire d’ordinaire paisible. En effet, aux doux reliefs vallonnés du bocage auxquels nous nous étions accoutumés, succède dorénavant une géographie particulièrement accidentée et couverte de végétation. Le long travail d’érosion des cours d’eau a contribué à dessiner falaises, escarpements ou gorges pour créer un paysage unique de petites montagnes. Le site le plus spectaculaire est sans aucun doute celui de La Roche d’Oëtre. Un incontournable ! Un chemin taillé à travers une végétation d’arbustes touffus permet d’atteindre le bord d’une falaise de près de 120 m de haut qui offre une vue inimaginable sur toute la Suisse Normande. En contrebas on ne peut qu’imaginer le cours de la Rouvre (un affluent de l’Orne) car l’ensemble de l’effondrement est particulièrement boisé. Détail amusant : de l’un de ces points de vues, le profil d’un visage humain se dessine dans la roche…

En reprenant la route, c’est le cours de l’Orne que nous longeons pour atteindre le lac de Rabodanges. Une vaste étendue d’eau due à la création d’un barrage hydroélectrique, en 1960, mais également utilisée pour les loisirs (activités nautiques, pêche, promenades). Les méandres de l’Orne deviennent particulièrement sinueux du côté du lieux dit La Courbe (qui abrite un hébergement parmi nos coups de cœurs. Voir rubrique pratique). Enfin, nous arrivons à Argentan, jadis entourée de fortifications dont il ne subsiste que de rares vestiges. Par sa position centrale dans le département, la sous-préfecture est aussi une ville qui invite à découvrir chacune des richesses de l’Orne. Une porte toujours ouverte en quelques sortes…

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